Par Jean-Claude Martegoute.
Le mur, sous ses différentes formes (murets anciens, cabanes de pierres sèches, ruines de constructions anciennes, « cayrous »), constitue un milieu inhospitalier pour les espèces dites saxicoles1 ou lapidicoles2 qui constituent la flore des murs ou flore muricole.
Ce sont les lichens (organismes constitués d’un champignon et d’une algue vivant en symbiose) qui vont oloniser en premier la pierre sèche, accompagnés par la suite de tout un
cortège de mousses (bryophytes), suivi de différentes plantes à fleurs et de diverses fougères, notamment le Cétérach officinal (Asplenium
ceterach).
Les conditions difficiles limitent la concurrence, elles permettent le développement d’espèces peu compétitives, adaptées à la sécheresse comme :
- Différentes Crassulacées, plantes grasses
Elles stockent l’eau dans leurs feuilles charnues, citons :
Le Nombril de Vénus (Umbilicus rupestris) : une plante succulente (gorgée d’eau). Ses feuilles sont caractéristiques : rondes, charnues, au pétiole partant du centre du limbe. Elles
peuvent servir, après avoir enlevé l’épiderme, de pansement cicatrisant en cas de coupure ou de petite blessure.
La Joubarde des toits (Sempervivum tectorum) : une plante magique qui protégeait les maisons de la foudre, d’où son nom populaire de « barbe de Jupiter », dieu du ciel.
Les Sédums : Le Sedum blanc ou Trique-Madame (Sedum album) et le Poivre des murailles (Sedum acre) sont les plus fréquents, on observe parfois le
Sedum des rochers (Sedum rupestre) à l’inflorescence recourbée en crosse avant la floraison et le Sedum de Nice (Sedum sediforme) plante protégée au niveau régional,
bien
présente sur le causse de Daglan. L’Orpin à feuilles épaisses (Sedum dasyphyllum) aux feuilles globuleuses, vert bleuté et aux fleurs d’un blanc rosé est moins fréquent, il
s’installe de préférence au niveau des joints du mur.
Le Nombril de Vénus Sédum de Nice Sedums acre et blanc
- Différentes petites plantes annuelles
Leur cycle de végétation très court leur permet de passer l’été sous forme de graines comme : la Sabline à feuilles de serpolet (Arenaria serpyllifolia), la
Drave printanière (Drava verna), la Drave des murailles (Drava muralis), le Saxifrage à trois doigts (Saxifraga tridactylites), le Pâturin
rigide (Catapodium rigidum) …
Drave printanière Drave des murs
Pâturin rigide Sabline à feuilles de serpolet
Parfois on observe sur le sommet des murs la Mélique ciliée (Melica ciliata), une belle graminée aux feuilles raides, souvent enroulées et aux épis blancs caractéristiques.
Sur les vieux murs moussus, partiellement éboulés ou sur les ruines, d’autres annuelles (le Géranium pourpre - Geranium robertianum subsp. Purpureum, le Geranium
luisant - Geranium lucidum, le Séneçon commun - Senecio vulgaris, la Cardamine hirsute - Cardamine hirsuta, …) et quelques plantes bisannuelles comme
différentes laitues sauvages, voire quelques arbustes exploitent un sol rudimentaire.
La Pariétaire de Judée (Parietaria judaïca) : une plante de la famille des orties qui ne pique pas. Elle pousse sur les vieux murs, parois rocheuses (Pariétaire vient du latin paries
qui désigne le mur ou la paroi). Ses feuilles alternes, ovales, molles, velues possèdent une paire de nervures arquées de chaque côté de la nervure
principale. Ses fleurs sont toutes petites, verdâtres groupées à l’aisselle des feuilles ; le pollen présente des propriétés allergisantes.
Pariétaire de Judée Cymbalaire
- Les fougères
La Capillaire des murailles (Asplenium trichomanes) est commune (il en existe différentes sous-espèces) ; la Rue des murailles (Asplenium ruta-muraria) forme une petite touffe dans
les anfractuosités des rochers et des vieux murs ; plusieurs espèces de Polypode (Polypodium sp.) aux rhizomes à goût de réglisse. Dans une ambiance humide, ombragée vit la
Scolopendre ou « langue de cerf » (Asplenium scolopendrium) aux longues feuilles entières avec à leur face inférieure des sores (groupe de sporanges) linéaires, parallèles obliques,
rappelant les pattes de la Scolopendre (Myriapode « mille-pattes »). La Capillaire de Montpellier ou « Cheveu de Vénus » (Adiantum capillus-veneris) moins fréquente, vit dans les
zones de suintement des rochers calcaires.
Le Cétérach officinal Asplenium ceterach, appelé Dorodille ou Herbe dorée, allusion aux écailles roussâtres protectrices des sporanges. Une plante capable de reviviscence : pendant
les périodes de sécheresse, les feuilles en se déshydratant presque complétement se recroquevillent. Après une pluie, elle se réhydratera et reprendra vie.
Sur la paroi verticale des murs une espèce, la Cymbalaire ou Ruine-de Rome (Cymbalaria muralis) mérite notre attention car elle présente un curieux comportement : elle sème elle-même
ses graines dans une fissure ou un joint de la muraille grâce au pédoncule du fruit qui continue à croître jusqu’à rencontrer une fissure ou un joint de la muraille, évitant ainsi tout
gaspillage.
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