par Jean - Jacques Jarrige
avec le concours de Daniel Chavaroche
Les noms des lieux du Causse des coteaux du Céou sont, comme ailleurs, des reflets de l’histoire de la région. On y retrouve les traces des langues anciennes qui ne sont plus en usage et de la langue occitane de moins en moins utilisée. Ces noms anciens découlent le plus souvent d’une caractéristique du paysage (relief, sol, végétation…) ou des activités des habitants. Le terme original a été souvent transformé à travers la tradition orale puis par la francisation imposée suite à la Révolution pour aboutir aux noms actuels figés par les cartes et l’administration.
Les noms terminés en « ac », courants sur le territoire, datent de l’époque gallo – romaine (2e siècle avant Jésus-Christ à 5e siècle après). Ils indiquent la présence d’une villa consacrée aux travaux agricoles (la terminaison romane ac vient du latin acum ou du gaulois akos). Ce suffixe qui signifie « domaine de », « chez », est précédé du nom de la personne. On retrouve cette origine dans Segonzac, Carpignac, Goursac, Julliac, Paulhiac…
La toponymie chrétienne apparaît vers le 6e siècle, à l’origine de Saint-Aubin, Saint-Cybranet, Saint-Martial-de-Nabirat, Saint-Pompon…
Quelques noms ont une origine celte ou germanique qui reste à préciser. Ce serait le cas de Daglan et de Gaumier.
Mais, beucoup de noms de lieux en Périgord ont une origine occitane, langue apparue aux alentours de l’an mil. Francisés à partir du 19e siècle, ils ont été souvent choisis en fonction d’une caractéristique du site.
Puech, serre (point haut), tèrme (coteau), còsta (pente), comba (combe), peira (pierre), gresa (cailloutis) ont donné Pechimbert, Pechauriol, Pech de Cayre, Plapech, Les Serres, Lacoste, La Suquette, La Combe Longue, Lascombes, Le Combal, Lapeyre, Le Peyruzel, Peyretaillade, Peyre Chaude, Lagrèze, Les Grèzes…
Cauç (pierre à chaux) a donné Les Causses, Mas de Cause, Causanel,
Les lieux-dits Les Igues et Le Cloup viennent des morphologies formées par le karst sur les plateaux calcaires des coteaux du Céou. Ils indiquent respectivement la proximité d’un gouffre et d’une doline.
font (source) est à l’origine de : La Font du Loup, Fontprime, Les Fontanelles, La Font de Nadal, Fonlalève…
La Bulide indique une source qui bouillonne.
La Payssière vient de peissièra (barrage à poissons)
Prat (pré), boiga (friche), airal (ruine, terre), bouisson (buisson), bòsc (bois) ont donné La Prade, Les Pratmigiers, Bouzic, Les Eyrals, Les Bouyssous, Le Bouscat…
Parcelles allongées : las lonjas, Les Longes ; las correjas, Les Courrèges
Enclos pérennes : lo claus, Le Clos ; lo cledon, Le Cledou ; las clèdas, Les Clèdes ; los embars, Les Embards, typiques de parcelles de vigne très souvent closes de murailles de pierre sèche.
Certains noms sont liés à la présence d’une plante, d’un arbre ou d’une culture.
La Genivrade (ginèbre, genièvre), Les Garrissades (garric, chêne), Les Fages (fau, hêtre) Les Castagnoles (castagniè, châtaignier), Le Fraysse (fraisse, frêne), Lalbarède (albar, saule blanc), Laumède, Lol (òlme, ormeau), Les Beysades (vaissa, noisetier), Pomarède (pomièr, pommier), La Tremoulette, La Piboulade (tremolèr, pibol, peuplier), Le Mespoulet (mespla, nèfle), Roumegouse (romèga, ronce), Les Ginestes, Les Genistetes (ginèst, genêt), La Bruyère, La Brande, Les Brugues (branda, bruga, bruyère), Les Calprades, Les Scalparèdes (calprenedra, charmille), Vivinières (vime, osier), Ramade (rama, la feuillée) … et bien sûr la vigne (vinha) avec Les Vignasses, La Vigne Grande, Les Treilles…
Certaines cultures sont à l’origine du nom : Ségalat (segal, seigle), Le Fromental (froment), Le Bayargal (balharc, orge), Les Millials (milh, maïs), Sparoutis (champ d’épautre) …
Quelques noms sont en relation avec un animal : Pech de Lagraule (graulo, frelon), Croze du Renard, Cantegrel (grelh, grillon) …
Bòria (ferme), castel (château), ostal (maison), cabana (cabane) ont donné Les Bories, Castelnaud, Castel Vieil, Loustalou, Les Cabanes… Leyssales (las salas) rappelle la présence d’une demeure seigneuriale ; Le Maine (lo maine) d’un hameau …
La religion chrétienne se retrouve dans La Crotz, Viel Croze (crotz, croix), La Capelette…
Certains noms renvoient à d’anciennes activités : Au Calfour (cauç, chaux – forn, four), La Farge Vieille, La Fargue (farga, forge), Les Jasses (jaça, bergerie), Ladaille (dalha, faux), Les Vitarelles (l’abitarèla, taverne, refuge), Le Treil (trèlh, pressoir), Les Tuiliers (teule, lauze taillée), La Mouline (molin, moulin)…, à d’anciens métiers : Le Moutonnier (motonièr, berger), Les Pastourels (pastorèl, jeune berger), Le Capelier (capelièr, chapelier), Le Récézaïre (recegaire, scieur), La Sabatière (sabotier)…
Enfin certains noms semblent découler du patronyme du propriétaire : Bachaud, La Bégonie (chez Begon), La Franquie (chez Franc), Les Queyssiols, Nadalie (chez Nadal), Naudet (chez Arnaudet)…
Pour finir cette revue, signalons que certaines communes, issues des anciennes paroisses, ont changé de nom depuis la Révolution : Florimont et Gaumier ont été réunis le 11 juillet 1827 ; Castelnaud-des-Milandes a fusionné avec Fayrac le 21 août 1827 pour devenir Castelnaud-Fayrac puis avec Castelnaud-la-Chapelle après la fusion-association avec La Chapelle-Péchaud ; Saint-Laurent-de-Castelnaud est devenu Saint-Laurent-la-Vallée le 20 novembre 1903. Saint-Aubin-de-Nabirat et Saint-Martial-de-Nabirat se sont réunis le 1er janvier 1973 puis se sont dissociés en 1983.
L’ensemble des communes fait actuellement partie de la Communauté de communes de Domme-Villefranche-du-Périgord qui comprend 23 municipalités.
Références :
P. Nollet, Noms de lieux du canton de Domme, Chamalières, 2010
A. Prégorier, Toponymie des noms de lieux en France, éd. IGN, 2006
C. Tanet et T. Hordé, Dictionnaire des noms de lieux du Périgord, éd. Fanlac, 1994
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